samedi 7 novembre 2009

Jun Takahashi, l'ovni fabuleux de la mode

the Undercoverlab, studio de création basé à Tokyo
Grace, collection Spring-Summer 2009




Grace, collection Spring-Summer 2009 made by Undercover Laboratories
coiffures Katsuya Kamo
photos Alice Bénusiglio


Né en 1969 à Kiryu au Japon, Jun Takahashi est un ovni hyper-créatif artiste en tout genre (styliste, designer, artiste) créateur de la marque Undercover. Il a fondé sa marque en 1988 avec des amis alors qu'il étudie la mode à la Bunka Academy of Fashion à Tokyo dont il sortira diplômé en 1991. En 1994, Jun Takahashi présente sa première collection à Tokyo et établit sa société Undercover. En octobre 2002, il présente sa première collection à la fashion week de Paris sous l'œil bienveillant de la discrète Rei Kawakubo (mythique créatrice de Comme des Garçons) assise au premier rang.
Le style qu'invente et réinvente Jun Takahashi à chaque saison est relativement indéfinissable. On pourrait dire que le styliste mixe le style punk, le streetwear, le merveilleux et le fantastique avec un raffinement et une dextérité épatante propre aux japonais. Chaque collection est un concept (Unreal and real Clothes, Earmuff maniac "evolving comfort", Grace, etc.) et nous propulse dans un nouvel univers si bien qu'à chaque saison l'on se demande : ou va t-il nous emmener cette fois-ci ?
A travers sa dernière collection Less but better, le créateur a choisi le minimalisme et le fonctionnalisme en s'inspirant du travail du designer Dieter Rams dont la doctrine "Less but better" rappelle furieusement le fameux "less is more" de Mies van der Rohe. Jun Takahashi mixe au sein d'une même collection des signes issus des matériels electroménager ou hi-fi de Rams à des motifs de forêt et d'eau. A priori, tout ceci n'a rien à voir, et pourtant la collection est cohérente. Le créateur se paye même la fantaisie d'utiliser des matières naturelles un peu insolites comme de la vessie de porc pour fabriquer des accessoires à l'aspect technique.



Less but Better, collection Spring-Summer 2010





Less but Better, collection Spring-Summer 2010
made by Undercover Laboratories

mardi 3 novembre 2009

Farhad Moshiri à la galerie Emmanuel Perrotin

Farhad Moshiri, Life is beautiful, 2009.
Instalation réalisée à partir de couteaux plantés dans le mur.
Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris

Farhad Moshiri, Tiger (détail), 2009.
Broderie, acrylique, fausse neige sur toile. 290 x 460 cm
photographie Guillaume Ziccarelli
Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris

Emmanuel Perrotin a un goût pour l'exotisme, l'art venu d'ailleurs. On se souvient de l'exposition de Barthi Kher (artiste anglaise/indienne?) de l'année dernière, à présent l'iranien Farahad Moshiri est à l'honneur à travers cette exposition Silly you, Silly me. Le travail de cet artiste est singulier, il mêle la tradition artistique iranienne au kitsch américain avec un regard acéré. Le résultat est tout à fait étrange et interpelle. L'iconographie fait penser aux vieux comics américains ou aux dessins animés. La plupart des tableaux sont recouverts de perles, leur facture est très soignée, rappelant le serti invisible de Van Cleef & Arpels. Deux œuvres attirent l'attention, Tiger, un petit tigre perdu dans une banquise de paillettes blanches et Life is beautiful, écrit à l'aide de couteaux plantés dans le mur.

jusqu'au 23 décembre
Farhad Moshiri
Silly you, Silly me

Galerie Emmanuel Perrotin
76 rue de Turenne
75003 Paris

vendredi 30 octobre 2009

James Ensor, prince des peintres

Ensor aux masques, James Ensor
1899, huile sur toile, 120 x 80 cm

Érudit, avant-gardiste, mystique, écorché vif, incompris mais entêté, libre, caustique et amer James Ensor (1860-1949) a produit une œuvre extraordinaire et éblouissante reconnue tardivement. Le musée d'Orsay consacre au peintre une exposition magistrale composée en quatre thèmes : Une modernité,"Je suis noble par la lumière","Partout la bizarrerie domine", Le peintre aux 112 autoportraits. Les tableaux de James Ensor nous happent littéralement tant l'univers de ce peintre tourmenté est complexe, mouvant, riche et étrange. Suite aux aléas de sa vie, James Ensor s'échappe peu à peu vers le merveilleux, le morbide, le fantastique et la satire faisant apparaître masques et vanités . Ses tableaux, estampes et caricatures nous appâtent pour mieux nous faire rire ou mieux nous effrayer.

"Visions. Les Auréoles du Christ ou les sensibilités de la lumière"
La Triste et Brisée. Satan et les légions fantastiques
tourmentent le Crucifié,

1886, fusain, craie noire et crayon sur papier Japon, 60 x 76 cm.

Le Foudroiement des anges rebelles, 1889, huile sur toile, 108 x 132 cm

Les Masques scandalisés, 1883, huile sur toile, 135 x 112 cm

Alimentation doctrinaire, planche I, deuxième état, 1889,
eau-forte rehaussée de lavis et de craie de couleur
sur papier Japon, 18 x 23,8 cm

Les Mauvais Médecins, 1892, huile sur panneau, 50 x 61 cm

Les Masques singuliers, 1892, huile sur toile, 100 x 80 cm

La Mort et les masques, 1897, huile sur toile, 78,5 x 100cm

Les Cuisiniers dangereux, 1896, huile sur panneau, 38 x 46 cm

critique: Hanté par ses démons
publiée dans le figaro


James (art)Ensor jusqu' au 4 février 2010 au Musée d'Orsay

jeudi 29 octobre 2009

Exposition organisée par Sang Bleu

Clusters: 1—surrounding John Giorno est une exposition commissionnée par Sang Bleu, le fameux magazine sur les tatous et les cultures underground, fétiches, etc. Jeanne-Salomé Rochat a réuni une dizaine d'artistes en leur proposant de faire référence au travail de John Giorno.
Les artistes : Sarah André, Stéphane Devidal, Iris Van Dongen, Antonello Faretta, Gilles Furtwangler, Athene Galiciadis, Simon Haenni, Charlotte Herzig, Thomas Koenig, Alix Lambert, Jelena Martinovic, Emanuel Rossetti, Fuzi Uvtpk, Matthew Hawkins.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Sang Bleu, le magazine est consultable à l'exposition.

jusqu'au 24 novembre
Brachfeld Gallery
78, rue des Archives
75003 Paris

SangBleu.com

Robert Delpire à la MEP

De gauche à doite (assis) Robert Delpire, Sarah Moon, sa compagne, et Martine Franck (debout) Jeanloup Sieff, Jacques-Henri Lartigue et Henri Cartier-Bresson, en 1973.

La Maison Européenne de la photographie célèbre la carrière impressionnante de Robert Delpire à travers une grande exposition rétrospective jusqu'au 24 janvier 2010. Grand passionné d'images, Robert Delpire n'a eu de cesse de découvrir et promouvoir les photographes de son époque à travers ses différents métiers : éditeur, directeur artistique, producteur, commissaire d'expositions, directeur du Centre National de la photographie.

Alors qu'il est encore étudiant en médecine, il se lance dans l'édition à 23 ans et publie la revue NEUF (en 1950) à laquelle il fait participer
Doisneau, Breton, Capa, Picasso, Sartre, et Cartier-Bresson. Puis en 1952, il fonde les éditions Delpire et met en valeur le travail de ses photographes favoris en publiant des monographies : Les Américains de Robert Franck, Tokyo de William Klein, Exils de Joseph Koudelka, Carnets de route de Werner Bishof. Il lance également la collection Maestro et publie Henri Cartier-Bresson Photographe et Etienne-Jules Marey Chronophotographe. En 1955, il publie la revue l'œil dont il assure la direction artistique pendant 8 ans.
Au début des années 60, il crée une agence de publicité dont il est le directeur de création, Delpire & Cie. Il collabore pendant de nombreuses années avec la marque Citroën mais également les marques Cacharel, Habitat, l'Oréal, etc. Parallèlement, il ouvre en 1963 sa galerie, ou il expose les grands noms de la photographie (
Smith, Koudelka, Kühn, Sander, Michals, Bourdin) et de l'illustration (André François, Savignac, Le Foll, Lubalin, Glaser, Blechman).
Par Ailleurs, Robert Delpire est également
producteur de films (Corps profond, de Lalou et Barrère, un classique du court-métrage ; Cassius le Grand et Qui êtes-vous Polly Magoo de William Klein, prix Jean Vigo 1967), il réalise aussi de nombreux films publicitaires et, pour la télévision, un film de 30 minutes sur l'œuvre d'Henri Cartier-Bresson.
Grand amateur d'illustration, il renouvèle la culture de l'édition pour enfant en publiant notamment Max et les Maximonstres de Maurice Sendak en 1967, puis lance les collections
Dix sur dix, Actibom et Multibom. Toujours passionné de photographies, il crée pour le Nouvel Observateur un supplément photos dans les années 70.
En 1982, il est nommé par Jack Lang à la tête d'une nouvelle institution, Le Centre National de la Photographie, pour laquelle il travaillera pendant quinze ans, lancera une collection Photo Poche (enfin des livres sur la photographie accessibles au grand public !) et présentera 150 expositions thématiques ou monographiques. Robert Delpire est dans son élément : l'aide à la création et à la diffusion de la photographie, ce qu'il a toujours fait au sein de sa maison d'édition sans avoir les moyens que lui offre le CNP. Il précise que c'est la plus belle période de sa carrière.

Cette grande exposition rétrospective est à voir. Elle est foisonnante et riche à l'image de la carrière fulgurante de Robert Delpire. Le graphisme des livres et des publicités a un peu vieillit, mais le regard humaniste de cet amoureux de la photographie et de l'illustration n'a pas pris une ride.

Maison Européenne de la Photographie
5/7 rue de Fourcy
75004 Paris
entrée gratuite de 17 à 20h
tous les mercredi

Les éditions Delpire

vendredi 23 octobre 2009

Shirin Neshat, Games of Desire

Shirin Neshat, Games of Desire, 2009.
Encre sur tirage couleur marouflé sur Dibond. 127,3 x 84,7 cm.
© Shirin Neshat. Courtesy Galerie Jérôme de Noirmont, Paris.

L'exposition Games of Desire de Shirin Neshat présente une série de photographies figurant des villageois Laotiens posant devant les fresques d'un monastère ainsi qu'un film mettant en scène ces mêmes villageois. Ils interprètent le rituel de la parade amoureuse à travers des chants traditionnels. Les chants semblent désuets et bucoliques dans un premier temps, puis deviennent de plus en plus coquins et érotiques.
Ce film est particulièrement touchant. La manière dont ces ancêtres s'animent peu à peu en évoquant leurs amours de jeunesse passés ou impossibles est charmante. Les yeux se mettent à briller, les visages se font de plus en plus souriants et les mains dansent. Une douceur tendre et ingénue émanent de ces êtres. Malgré l'usure de leur vie visible sur leurs visages creusés et ridés, leurs sourires édentés, on s'aperçoit que le désir et l'envie sont restés intacts.

jusqu'au 21 novembre 2009
Galerie Jérôme de Noirmont

36, avenue Matignon
75008 Paris

Patrick Van Caeckenbergh à la galerie Insitu



La Psychopompe - Partie 2
Patrick van Caeckenbergh
2009, bas relief, matériaux divers 205 x 150 x 5 cm
Courtesy In situ Fabienne Leclerc
photographies: Alice Bénusiglio

L'exposition Le Brouhaha (1999-2009) de Patrick van Caeckenbergh s'achève demain à la galerie Insitu/Fabienne Leclerc. J'avais déjà pu apprécier l'univers étrange, surréaliste, fantastique, poétique, pseudo-scientifique, parfois ludique de cet artiste lors d'une belle exposition monographique Les bicoques à la Maison rouge en 2007.
Une fois encore, l'univers singulier de l'artiste m'a beaucoup séduite. Son travail est essentiellement composés d'assemblages, de collages, d'installations proches du cabinet de curiosités ou du décor de théâtre à travers lesquels Van Caeckenbergh développe sa propre mythologie. Passionné de taxinomie, il assemble, il accumule, il colle, il trie, comme dans son œuvre TOUT, sorte d'encyclopédie imaginaire, représentée par des collages sur des cartons qui seront rangés dans une boite en forme d'accordéon. Cette œuvre est symbolique du travail de l'artiste, elle représente la vie comme une grande pièce de théâtre ou chaque petit élément à son rôle à jouer. Le communiqué de l'exposition commençait par «Patrick van Caeckenbergh réfléchit à la place de l'homme dans le monde et travaille sur l'idée qu'il est un animal domestique tendant sans relâche à mettre de l'ordre dans le chaos». On perçoit à travers cette phrase toute l'ironie propre à l'artiste flamand (et aux artistes belges comme Wim Delvoye ou Jan Fabre friands de fantaisies provocatrices dans leurs œuvres également).

Galerie In situ / Fabienne leclerc
6 rue du Pont de Lodi
75006 Paris

mercredi 21 octobre 2009

Joseph Kosuth au Louvre

«Je me tiens devant un mur de pierre du XIIe siècle, le mur de fondation du premier palais du Louvre. Je commence avec le matériau de construction cher à Nietzsche.» Joseph Kosuth

L'exposition 'ni apparence ni illusion' de Joseph Kosuth est un parcours initiatique, poétique et philosophique dans les fossés du Louvre médiéval. On circule en se laissant guider par les phrases qui nous incitent à réfléchir sur la mémoire, le passé, l'empreinte de l'histoire. Les typographies italiques écrites en néons blancs apparaissent comme des messages subliminaux et apportent une dimension nouvelle au lieu, aux murs.
Joseph Kosuth, à travers cette très belle exposition, nous permet d'appréhender différement une partie du Louvre peu connue, et d'apprécier l'art conceptuel.

lundi 19 octobre 2009

Art Nouveau Revival au musée d'Orsay

Aubrey Beardsley, estampe pour le livre Salomé d'Oscar Wilde.

L'exposition Art Nouveau Revival ouvre ses portes au public dès aujourd'hui au musée d'Orsay jusqu'au 4 février 2010. Elle retrace de nouvelles interprétations de l'Art nouveau à travers les Arts Appliqués du XXe siècle.
La première salle présente l'hommage des surréalistes au mouvement avec en pièce phare, une très belle toile de Dali : L'énigme du désir – Ma mère, ma mère, ma mère. D'autres toiles de Clovis Trouille tout à fait amusantes sont également exposées.
La deuxième salle est dédiée au design organique, réunissant une multitude d'objets et meubles d'époques différentes avec un penchant pour les années 60, 70's. Certains meubles érotiques retiennent l'attention et font sourire, ils semblent tout droit sortis du film Orange mécanique. La troisième salle met en évidence le lien entre Psychédélisme et Art nouveau.
La quatrième intitulée c'est la mode! présente une réinterprétation des formes de l'Art nouveau à travers de nombreux objets dérivés. Dans cette salle sont exposés de magnifiques estampes d'Aubrey Beardsley, célèbre dandy illustrateur de la fin du XIXe. Enfin, l'exposition s'achève dans une petite pièce dédiée au Naturalisme. On retiendra les toilettes incroyables en forme de mouche (1966) de François Xavier Lelanne, ainsi que les miroirs d'Yves Saint Laurent.

Cette exposition est originale et présente de l'intérêt. L'Art nouveau y est appréhendé au sens large du terme. Néanmoins, la scénographie manque d'élégance et écrase l'ensemble (ses murs violets fluo, ce n'est pas possible !). Malgré ce bémol, la profusion d'objets et de pièces rares valent le déplacement.

samedi 17 octobre 2009

Exposition VOGUE COVERS

Vogue présente jusqu'à la fin du mois une série de couvertures sur une enfilade de panneaux exposés en plein air en bas de l'avenue des Champs-Elysées. Les choix des couvertures sont discutables. Un sentiment vieillot se dégage de l'ensemble. Néanmoins les couvertures des années 30 sont très belles. Certaines retiennent beaucoup plus l'attention que d'autres. Voici une petite sélection :

Couverture signée Robert Doisneau. Juin 1951.
J'aime beaucoup le voilage du chapeau, on dirait un petit nuage.

L'image du rêve, du luxe, du glamour se confronte à la réalité :
un clochard recroquevillé dans le froid avec comme seul
compagnon son chien.


Photographie signée Steven Meisel, Août 1989.
Linda Evangelista et son look moderne des 90's androgyne à souhait.

Juin 1924, le concours de la plus jolie silhouette. Désuet et mignon.

Deux touristes : photographie de la couverture d'Andy Warhol,
avec la main qui souligne le nom de l'artiste.

La plus spectaculaire, couverture de Dali, Vogue décembre 1971.
Marilyn transformée en Mao.
Un graphisme et une rédaction en chef dite totalitaire réalisés par l'artiste.

David Hockney est invité comme rédacteur en chef de ce numéro de décembre-janvier 1985/1986

La beauté gracile d'Audrey Hepburn, sublime égérie de Givenchy.
Son époux, Mel Ferrer s'incline vers elle.
photographie : Bert Stern, Mai 1963.

Photographie : Richard Rutledge, Novembre 1949.
Regard malicieux, visage blotti dans un col de vison,
petit bouquet de violettes. adorable !